L’économiste est forcément néophyte en matière de plantes :
l’attrait vint d’abord de leurs vertus médicinales et de leur capacité à se
substituer, dans de nombreux cas, aux médicaments importés, chers en devises
pour les pays du Sud, chers pour les familles pauvres.
Dire que je connais LES plantes serait mensonge. Devenu
depuis peu Président de POTAGERS SANS FONTIERES, une nouvelle association créée
dans le Val-de-Marne (France), m’incite à écrire ce billet, ainsi que des
discussions avec un tradipraticien malien de mes amis et le secrétaire de
l’association qui a des mains en or en matière de jardinage. Nous avons
partagé. Je restitue.
Vous avez sûrement lu, sur ce blog, le billet à propos des
plantes magiques. Plus j’avance, plus j’ai la certitude qu’il me faudrait trois
vies pour les décrire toutes. Ce billet
est un raccourci devant mon incapacité à en faire l'inventaire.
Revenons au point de départ : l’économie. Il était à la fois macro (économiser des devises) et micro (augmenter le revenu ou diminuer la dépense des producteurs du Sud, notamment en matière de santé). Déformation professionnelle qui me pousse à parler du Sud alors que POTAGERS SANS FRONTIERES naît au Nord, là où vivent aussi plein de gens du Sud qui gardent, dans un coin de leurs placards d’HLM, des plantes envoyées par leurs frères et sœurs des pays d’origine. Sokhna, du Sénégal racontait qu’elle soignait sa grippe à Nantes avec du Nguer (Guiera senegalensis). Moi-même avait suivi les conseils d’amis au Sénégal et soigné mes extinctions de voix et mes rhumes avec la même plante.
Mais il faut être juste « Nos grands-mères (nous
parlons de celles d’Europe) savaient[1] ».
Pour elles la bourrache, la guimauve, la camomille, le thym et la lavande,
l’ail et l’oignon n’avaient pas de secret quant à leurs vertus thérapeutiques. Elles
ne tenaient pas cela du médecin mais de leurs parents, de même que les
tradipraticiens ont acquis leur savoir auprès de leurs parents. Point n’était
besoin pour elles de se rassurer par une norme européenne ou de multiples
expérimentations scientifiques qui auraient validé les pouvoirs de la plante.
Aujourd’hui, les herboristes ont du mal à exister en Europe. Par chance les plantes
se vendent toujours sur les marchés africains. C’est mieux que les médicaments
frelatés !
Le monde a bien changé, provisoirement. La plante a été
remplacée par la molécule qui en a été extraite pour être revendue en gélules,
en comprimés ou en sirops. Géographiquement parlant, la plante part souvent des
pays du Sud pour y retourner sous forme de molécules enfermées dans un
contenant. Avec la plus-value, la licence et les royalties qui vont avec.
L’introduction des médicaments génériques atténue à peine la punition de la
facture et les multiples contrefaçons créent de nombreux dégâts en matière de
santé publique.
Fleur de bourrache. Photo B.Taillefer |
Recherche médicale et business riment et rythment la santé
des peuples. Au nom de la science et d’une médecine à prétention universelle.
On aurait pu le croire si la médecine ayurvédique ou la
médecine chinoise n’avait pas existé. Je cite celles-là, plus connues, plus
documentées que la médecine africaine si confidentielle puisque transmise à
l’intérieur de familles jalouses de leurs savoirs. Qu’importe : notre
supériorité pseudo scientifique occidentale est un immense leurre qui fait fi
de nos propres savoirs ancestraux, ceux de nos grands-mères, du Nord comme du Sud.
Et le pouvoir de la molécule est contredit par de nombreuses
observations.
La première observation tient au fait que LA plante a, pour nombre d’entre
elles, la capacité de soigner les hommes, les animaux et les autres plantes.
Sur ce dernier aspect, donnons quelques exemple : neem,
melia, tabac, rhubarbe, girofle, lavandin, menthe, lavande, ail, cèdre, ortie,
pyrèthre, citronnelle sont d’excellents insecticides, chacun avec leurs
pouvoirs. Nul besoin d’organismes génétiquement modifiés pour que les plantes
survivent. Exit les molécules chimiques utilisées dans les produits dits
« phytosanitaires » qui rendent si gravement malades tant et tant
d’agriculteurs et qui tuent les abeilles[2].
Pour que les plantes poussent bien, l’ortie, la consoude, le
tithonia (qui a fait ses preuves dans la milpa mexicaine !), le
gliricidia, le leucaena, certains acacias, etc. peuvent booster très
efficacement les cultures. Mais aussi le crottin de cheval ou le guano de
chauve-souris. Posons-nous une question : les producteurs du Sud, souvent
pauvres, victimes fréquemment des aléas climatiques, ont-ils objectivement
intérêt à acheter des engrais chimiques (NPK : azote, phosphore,
potassium) alors qu’ils trouvent cela gratuitement dans la nature ?
Les pommes de terre poussent dans la paille, même sur sols
arides et pauvres. Des jardiniers ont inventé le jardin lasagne, sans terre. Le
non-labour devient à la mode : surprenant ? Que nenni ! La forêt
primaire a-t-elle jamais été labourée ?
Un champ de tabac en Ituri (RDC) Photo B.Taillefer |
Fleur de tithonia, RDC CONGO. Photo B.Taillefer |
Un jardin en lasagne. Maison de l'environnement, ANGERS (France) Photo B.Taillefer |
Je retrouve, par les plantes, ce travers de la science vu
dans d’autres disciplines : disséquer, extraire, rechercher l’infiniment
petit au lieu de pratiquer l’analyse systémique, globale, prenant la vie dans
la synergie de ses constituants. Loin de moi l’idée de rejeter la science :
mais son approche est loin d'être la seule possible.
Une femme française témoigne dans un documentaire d’Arte[3]
que son cancer du sein a été traité par la médecine ayurvédique. Les solutions
proposées par les cancérologues de son pays ne lui plaisaient pas. Guérie, elle
a invité son cancérologue en Inde pour qu’il découvre la médecine
ayurvédique. L’homme a apprécié, respecté la démarche de ses confrères indiens
mais jamais ne renoncera ou même ne modulera son approche.
Allons plus loin : n’a-t-on jamais entendu parler de
personnes qui ont la main verte ? Que dire de ces agriculteurs qui
pratiquent la biodynamie[4],
liée entre autres au cycle lunaire ? Et pourquoi certaines personnes
dorment mal quand il y a la pleine lune ? Et pourquoi tant d’accouchements
en cette période ? Que dit la science ?
Hier soir, les enfants qui aident à cultiver le jardin
expérimental de POTAGERS SANS FRONTIERES découvrent une coccinelle et quatre
carabes dorés, gloutons de pucerons sur les rosiers, arrivés dont ne sait où, en pleine ville. Pourquoi donc sont-ils
venus enrichir les équilibres biologiques du jardin expérimental ?
Alors que nous n’avons pas encore pris le temps de construire notre
« hôtel à insectes » ?
Le jour se lève : les oiseaux chantent tandis qu'un coq ose les accompagner, en plein quartier urbain de la région parisienne. Pourquoi ?
Dis-moi la science !
Hôtel à insectes dans le par Terra Botanica d'Angers Photo B.Taillefer |
merci Bernard. J'essaye d'en faire autant dans mon petit jardin… ça pousse ça pousse !
RépondreSupprimerMon docteur indien :
RépondreSupprimerhttp://www.youtube.com/watch?v=uvD7yP7h-EE
Et, ici, il y a même l'adresse du médecin :
http://mondocteurindien.com/
Mais je suis restée sceptique sur ce film, sachant que les cancers du sein n'évoluent pas toujours. Par contre, reprendre confiance en soi, oui, surtout pour se battre contre le cancer, puisqu'il faut être positif, et trouver les forces (et le plaisir surtout) de faire du sport.
J'ai bien quelques herbes dans un coin de ma pelouse, mais ce sont surtout des aromatiques.
Une chose m'inquiète cependant, c'est la première année que je ne vois aucune abeille butiner les fleurs, alors que je n'ai jamais mis de produits phytosanitaires. Quant aux coccinelles, il y a bien longtemps que je n'en ai pas vues.
J'espère que ce n'est pas le gazon de foot de mes voisins qui les a fait fuir, ni leur plantes en plastique. Eh oui, ça arrive, même dans les pelouses, le plastique est partout.....ça évite d'arroser et d'entretenir !
Peu-être la pluie et les températures basses (13° aujourd'hui), j'espère encore....
Chantal.